Quand je dis perso, ça ne signifie pas que je découvre par moi-même. Simplement que ce n'ets pas mon frère qui va me dicter ce goût là. Une grande première.
Nous sommes au collège. Samuel est installé depuis la rentrée, à la table voisine. Camarade singulier, j'ai découvert récemment que ce type écrit. Depuis le CM. Qu'il écrit des histoires entières.
Moi j'ai encore du mal à en lire. Lui, ; il en écrit. Ainsi,il n'est donc pas nécessaire d'avoir plus de 35 ans pour ce genre d'activité ? Ce n'est pas un métier ? On peut avoir la prétention bâtir des histoires sans plusieurs années d'études ?
Le personnage singulier devient alors fascinant. Il me raconte ce qu'il écrit, il me fait lire. C'est presque aussi simple que les scénarios que j'invente avec mes légos. Mais c'est écrit.
Il me raconte aussi comment il fait. Qu'il a écrit toute une histoire, d'amour et d'aventure, je me souviens même du nom de l'héroïne, celui de la soeur d'une camarade de classe, en écoutant un album d'un groupe dont le nom est une farce : Toto. Des histoires, Toto...
Il me donne l'histoire, la cassette audio et me dit d'écouter « Africa » , en boucle, au fil de la, lecture. En soi, je ne me souviens pas avoir ressenti plus d'émotion que ça, pas de corrélation évidente. Mais j'ai écouté l'album entier, avec le recul, je ne pouvais pas commencer par mieux, car c’est aussi le plus accessible. Certains morceaux me rappellent quelque chose. Oui, j'ai entendu ça bien des fois, et pour cause : cet album est multi disque de platine. Ca aussi, c'ets rassurant, pour moi. C'est une garantie de nae pas écouter n'importe quoi.
Les mélodies sont accrocheuses, la guitare saturée juste assez pour me donner des frissons sans me faire peur. En quelques passages, Rosanna, Africa, Hold you back, make believe, Lovers in the night... tous me restent gravés. Rien à jeter.
Avec mon argent de poche, peu à peu, je vais peu à peu acheter tous les albums qui me manquent, et ceux qui sortiront les années suivantes, m'intéresser à la composition du groupe, son évolution, ses racines.
Si IV et Hydra sont totalement liés à Samuel, tous les albums de Toto laissent des séquelles dans mon adolescence. Ils ont été d'abord fondateurs, écoutés en boucle, avant de devenir des refuges, des purges nécessaires lorsque je saturais :
Fahrenheit, premier album avec J. Williams à la voix, le plus ballade et jazz de tous, me rappelle mes vacances, seul avec mes parents, en Limousin. Chaque année nous nous y rendions. Depuis le décès de mon arrière-grand-mère, nous logions dans le pavillon de ma tante, dans les hauteur d'un village porcelainier surplombant la Vienne. Dans cette maison dont nous dérangions le sommeil (elle voulait y prendre sa retraite), j'oubliais la longueur des journées rythmées par les visites d'usines et de vieilles tantes (toutes les racines de mon père, que j'ai fait miennes, ma Foi) avec mon baladeur et les ,chaudes mélodies, langoureuses, de Fahrenheit.
Turn Back me rappelle un printemps froid en Vendée. Un des albums les plus rocks, brut, moins mélodique que les autres, du groupe. La plage déserte, la marrée basse, le crachin et le vent. De l'humidité partout, qui pénètre jusque dans les pièces de cette maison faite pour rester ouverte, faite pour l'été. Je me promène à journées entières, dans le quartier fermé qui me renvoie l'écho de mes pas et fait gémir le vent entre les immeubles.
De Seventh One, j'ai déjà parlé (voir « only the children » )
Du premier album, éponyme, je retiens le souffle, la conception, qui m'accompagne alors que j'écris. Je veux des mots qui semblent avancer comme les chansons de ce groupe. C4est un album sur lequel j'ai décidé de me concentrer, comme Sam l'avait fait sur IV. Je ne ferai jamais de récit de plus de 10 pages.
Puis je me souviens avoir été lassé par les changements de chanteurs. Je comprends depuis peu que ce groupe s'est bâti sur des musiciens, et que la place de chanteur est la moins « stratégique » .
D'autres le disent mieux que moi. Ce qui m'a fait adhérer à leur histoire, ce sont des tas d'anecdotes, et le plaisir de découvrir toute une culture nouvelle, et me l'approprier : faire le savant en énumérant les fondateurs : la famille Porcaro, David Paich, Steve Lukather, qui sont des musiciens de studio hors-pair lorsqu'ils décident de tenter l'aventure, pouvoir rire des idiots qui pensaient que ce groupe avait émergé avec la vague Hard-rock, être capable de donner la définition de « rock californien » (ouais, tu vois, pas comme les Beach-Boys, eux, c'est du surf-rock...) ou de « rock-FM » , étiquette que je colle jusqu'au son de Guns'n'roses (tiens, d'ailleurs, c'est quelque chose qui me gêne sur l'album Kingdom of Desire, qu'avec le temps j'ai appelé l'album Guns'n roses), et découvrir toute une mouvance de ce rock FM dans lequel je me sens très à l'aise, au final.
Voilà ma culture rock, et mon vocabulaire anglais. La première émerge avec eux, leurs chansons parfois gluantes, et la seconde avec leurs paroles répétitives,sans trop de vocabulaire, leurs images facilement compréhensibles et réutilisables.
Mais au final, ce qui me reste de Toto, c’est cet inoxydable, même daté, son de guitare, toujours un solo quelque part, ces constructions soignées, cette efficacité musicale, cette disponibilité des musiciens que je traque sur chaque album auxquels ils ^participent et me permettent de découvrir des nouveaux groupes, de nouveaux sons.
Toto est une des premières pierre de mes fondations musicales. Aujourd'hui j'en suis très fier.